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Une fâcheuse affaire ...

La simple évocation du mot charivari sur les cours chalabrois, ranime immanquablement la mémoire de Jacques Fleury et le rendez-vous annuel du 13 décembre, immuables retrouvailles auxquelles les « arrossegaïres » de tous âges participent depuis 1697. Pourtant, à la lecture d’une lettre retrouvée dans les archives départementales par notre concitoyen Francis Garcia, il apparaît que les tumultes nocturnes étaient plutôt fréquents en Kercorb. Tel celui qui s’était déroulé une certaine nuit du printemps 1846. Un événement semble-t-il assez sérieux puisqu’il avait motivé un échange de courrier entre M. le préfet de l’Aude et les services du 1er bureau de la division de la police générale du Ministère de l’Intérieur à Paris. Reproduite in-extenso ci-dessous, la lettre du sous-secrétaire d’état, écrite en date du 7 avril 1846 et adressée à M. le préfet de l’Aude.

Lettre Sous-Secrétaire d'Etat.JPG

« Monsieur le Préfet, j’ai reçu la dépêche que vous m’avez adressée, le 30 mars dernier, pour me rendre compte des scènes de désordre qui ont eu lieu à Chalabre, au sujet de l’arrivée d’un nouveau curé. Il en résulte que ces démonstrations tumultueuses et fort répréhensibles tiennent à l’antipathie d’une partie de la population contre M. l’abbé Figeac.

J’ignore si cet ecclésiastique a réellement les torts que la multitude lui attribue, mais j’ai vivement regretté qu’en cette circonstance l’autorité locale ait agi avec insouciance et faiblesse. Quelques arrestations ordonnées à propos, des procès-verbaux dirigés contre les meneurs, la présence d’un détachement militaire qu’on aurait pu réclamer auraient probablement contenu les agitateurs et les hommes de désordre. Au lieu d’agir avec promptitude et fermeté, on s’est borné à des mesures inefficaces.

Je vois l’explication de ces lenteurs et de ces incertitudes dans la lettre que vous a adressée M. le Maire de Chalabre : ce fonctionnaire vous déclare assez nettement que son habitude est de respecter le voeu de l’opinion publique, et que par conséquent il est assez disposé à ne pas sévir contre les auteurs des scènes provoquées par le peu de sympathie des habitants contre le curé, peut-être même par l’imprudence de cet ecclésiastique. 

M. Anduze-Faris, Maire de Chalabre et membre du Conseil Général de l’Aude, occupe parmi ses concitoyens une place distinguée, et je ne doute pas qu’il ne soit fort bien en mesure de connaître l’étendue et la limite de ses devoirs : je ne puis donc croire que dans la réunion de quelques tapageurs et d’un certain nombre de mauvais sujets qui ont donné un charivari, affiché des placards honteux et commis des délits prévus par la loi, il ait jamais pu voir une manifestation sérieuse et respectable de l’opinion publique. Ce serait attacher un triste prix à la popularité que de penser ainsi et de tenir davantage à l’approbation des auteurs du désordre qu’à la marque de haute confiance que le Roi a donné à M. le Maire de Chalabre en l’appelant aux fonctions municipales. J’ignore si la lecture de sa lettre vous aura suggéré ces réflexions ; mais elles n’ont pu m’échapper, et j’ai regretté que la lettre de M. Anduze-Faris m’ait fourni l’occasion de vous les communiquer.

Je désire que vous vous concertiez avec l’autorité judiciaire et avec l’autorité diocésaine pour donner à cette fâcheuse affaire la suite que réclament les intérêts de l’ordre et les convenances religieuses : veuillez également prendre les mesures nécessaires pour qu’à l’avenir la tranquillité publique ne puisse être troublée à Chalabre.

Lettre Sous-Secrétaire d'Etat 2e.JPG

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