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Août 1944 : Quand le Républicain espagnol Juàn Rico entrait dans Paris

Les célébrations du 80e anniversaire de la Libération donnent une nouvelle occasion de revenir sur le parcours du citoyen Victor Baro, alias Juàn Rico. Un parcours certes plusieurs fois évoqué ici, mais qui reste inscrit dans l'épopée de la libération de la France et de l'Europe. Intégré dans une avant-garde de la 2e Division Blindée du général Leclerc qui entrait dans Paris au soir du 24 août 1944, Juàn Rico avait pris part aux combats pour la Libération de Paris, aux côtés des Forces Françaises de l'Intérieur.

libération de paris,victor baro,juàn rico,aseref« Anarchiste espagnol ! Je suis l'un des seize survivants de ceux qui sont entrés les premiers dans Paris. J'étais le plus jeune et j'avais une guitare. Le capitaine Dronne m'a dit : « Rico, ce n'est pas le régiment des mandolines ». J'ai caché ma guitare sur le tank. Il n'était pas commode, nous non plus. C'est le seul qui a voulu de nous,... et nous de lui. Il parlait l'espagnol, nous on se débrouillait en français mais le coeur y était. Si bien qu'à la Porte d'Italie, quand nous sommes arrivés et qu'une femme a crié : « Vive les Américains ! », un de mes camarades a répondu : « Non Señora Madame, yo soy un Français ». C'est vrai, nos half-tracks portaient des noms espagnols, sauf celui où j'étais, appelé « Les Cosaques », probablement parce que nous chevauchions vite à l'avant-garde, sans trop faire de cadeaux à l'ennemi ».

Ce témoignage, recueilli en août 1984 par René Mauriès, journaliste à la Dépêche, est celui de Juàn Rico, nom de guerre de Victor Baro, décédé à Chalabre en 1987. Républicain espagnol né le 12 janvier 1923 à Barcelone, Victor Baro avait franchi les Pyrénées le 15 février 1939, avant d'être interné dans le camp de concentration du Barcarès. Il avait ensuite opté pour un engagement dans les corps francs de l'armée française en Afrique, qui deviendront les Forces Françaises Libres. Il fera ainsi campagne avec le 3e régiment du Tchad, qui serait baptisé « 2e division blindée (2e DB) »,… le 24 août 1943, sous les ordres du général Leclerc. Victor Baro avait intégré la 9e Compagnie, composée de 166 éléments, dont 144 de nationalité espagnole, et commandée par le capitaine Dronne.

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La 9e Compagnie, à Dalton Hall (Angleterre, printemps 1944), avant son départ pour la Normandie et Utah Beach (1er août 1944). Au premier rang Raymond Dronne (5e à partir de la droite), au 4e rang Victor Baro (1er à partir de la droite).

Le jeudi 24 août 1944, le général Leclerc qui applique les principes de l'attaque à tout prix depuis que les Français sont entrés en Normandie, lance un ordre au capitaine Dronne : « Dronne, filez sur Paris, entrez dans Paris, passez où vous voudrez, dites aux Parisiens de ne pas perdre courage, que demain matin la division toute entière sera dans Paris ».

Le soir même à 20 h 41, trois chars et trois sections sur half-track de « La Nueve » entrent dans Paris par la Porte d’Italie. A 22 h 20, il fait encore jour lorsque les sections Michel Elias et Miguel Campos de la 9e Cie arrivent sur la place de l’hôtel de ville, accueillies par les FFI du colonel Henri Rol-Tanguy, ancien des Brigades Internationales. Victor Baro est dans le half-track de commandement « Les Cosaques », matricule 410782, sous les ordres du lieutenant Amado Granell Mesado, et du sergent-chef Valero.

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Après être entrée dans Paris, « la Nueve » du capitaine Dronne alignait, le 26 août, ses chars devant l'Arc-de-Triomphe. Elle formait la garde d'honneur du Soldat inconnu pour l'arrivée du général de Gaulle, et une immense banderole aux couleurs de la République espagnole barrait les Champs-Elysées. Entre temps, plus de quatre mille réfugiés espagnols avaient participé au soulèvement de la capitale, et l'un de leurs chefs, José Baròn Carreño (chef de la Agrupaciòn de Guerrilleros Españoles pour la zone nord de la France), était tombé Boulevard Saint-Germain (le 19 août).

libération de paris,victor baro,juàn rico,aserefLes célébrations du 80e anniversaire de la Libération du pays, permettent de ranimer le souvenir de Victor Baro et de ses compagnons de combat. L'occasion également de reprendre la conclusion de l'article publié le 5 septembre 1984 sous la plume de René Mauriès : « Muchas gracias -merci beaucoup- à ces cousins de sang qui, vaincus à Madrid, où nous étions absents, firent un si long et douloureux parcours pour rentrer en vainqueurs dans Paris. Mais la course à la liberté n'est-elle pas l'éternel rêve de Don Quichotte ? » .

Juàn Rico, a été décoré de la croix de guerre avec citation :

« Le 12 août 1944 à la tombée de la nuit, le half-track du commandant de la compagnie a été attaqué par une voiture blindée allemande. Les soldats Victor Baro et Manuel Lozano, tireurs à la mitraillette, répondirent aussitôt malgré un feu nourri dirigé sur eux, immobilisant la voiture ennemie et tuant deux Allemands sur trois. La présente citation comporte l'attribution de la Croix de guerre avec étoile de bronze » (La voiture allemande en cause était un véhicule blindé chenille armé de mitrailleuses). « Fait à Ecommoy le 14 novembre 1984, d'après les mentions portées sur le journal de marche de la 9e compagnie du R.M.T dont j'ai gardé copie ».  Raymond Dronne signé.

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Le half-track Les Cosaques sur les Champs-Elysées

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Message adressé par Victor Baro au Capitaine Raymond Dronne, nommé Colonel en 1947.

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En cette même année 1947, Moïse Condomine, Pedro Sancho et Victor Baro se retrouvent devant la maison natale du Capitaine Jean Danjou, lors de la commémoration de la Bataille de Camerone

Commentaires

  • Gloire à eux ! Encore et encore MERCI !
    "Lest we forget "......

  • Tous les ans je relis l'histoire de Victor Baro et je m'en veux toujours autant de l'avoir croisé pendant des années sans savoir ce qu'il avait fait ce soir du 24 août 1944 à Paris.
    Et tous les ans je me demande aussi quel est le con qui lui a trouvé le surnom qu'il avait !

  • Bonsoir Patrice, le surnom qu'on lui donnait, devant lui, était de sa personne, c'est lui qui traitait les gens de cornichon, c'est le premier mot qu'il a appris en français
    amicalement

  • Victor Baro!!!!
    .je me souviens tres bien de lui !
    plus precisement d'une apres midi d'aout 1984 où, attablé au cfé Tournois, il évoquait ses souvenirs avec Mr Subreville le pere de Jeau Paul.
    Lui, le guerrillero de la "nueve" de la 2ème DB de Leclerc, Mr Subreville le maquisard de Picaussel qui apres avoir libéré Chalabre et le Kercorb de l'oppression nazie , s'etait engagé dans la 1ère Armée de De Lattre pour " terminer le ménage"
    j'etais present et j'écoutais admiratif ces deux modestes héros.
    Ils furent tres loquaces pour évoquer le jour où victor venant de normandie rejoint la ère Armée (et mr Subreville) aux alentours de Dijon
    Cet echange de souvenir a duré pres de 3 heures et pour ceux qui connaissent ma passion pour cette période de notre histoire ils devinent dans quel état d'esprit je pouvais etre.
    Depuis chaque année , je n'oublie ni .l'un ni l'autre à cette date car si notre génération et celles qui nous suivent vivent en paix et dans la Liberté , c'est grâce à ces héros valeureux que l' on a tendance à oublier surtout à cette époque où les courants révisionnistes et plus banalement l'oubli se propagent trop facilement.
    Un philosophe disait " qu'un peuple sans histoire (sans mémoire) est un peuple qui n'a pas d'avenir"!!
    au fait , en ce 80ème anniversaire de la Libération de Chalabre, qu'a t on fait pour notre mémoire collective????

  • Un grand merci à notre historien local. Cette explication relative au surnom de "Cornichon" me rassure et m'amuse en même temps

  • Je me suis abstenu de poser la question concernant ce surnom, de peur de soulever quelques secrets inavouables.
    Merci à Patrice d'avoir franchi le pas, congratulations à Serge - mémoire vivante du Kerkorb - à qui rien n'échappe.

  • Une vidéo à circulé dernièrement, "Ils ont libéré Paris", environ 93 min, qui date de 2014, Les commentaires sont de Jacques Gamblin..Il y a au bout de 1h 06 et 17 s un passage avec notre Jean Rico, mitrailleur lourd sur "le Cosaque', nous le reconnaissont facilement
    Fournié

  • Cette question sur son sobriquet attise la curiosité ! Je me la suis po- sée il y a fort longtemps voici la réponse. A l'usine , a la sortie de la guerre un quidam découvre son glorieux passé et demande a Victor BARO " Mais tu t'appelles comment RICO ou BARO ? " Oh tu m'appelles comme tu veux RICO, BARO et même cornichon si ca te va !" IL n'en fallait pas plus.

  • Comment voir cette vidéo ? merci de nous donner un lien.

  • Bonjour,
    Je pense que c'est ce film que parle Serge:

    https://www.youtube.com/watch?v=O4g0lQciIhU

    Il semble bien reconnaitre Victor avec ses jumelles sur son char à l'heure indiquée par "le carbounier"

  • Bravo Paillou, oui c'est lui avec les jumelles

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