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  • Une passion, les champignons

    bernard cnocquart« Dans les bois mouillés les petits champignons, au chapeau si mignon, un matin d’automne se sont réveillés, et ingénument ils ont bâillé ». Ces premières paroles d'une chanson, anonyme, en révèlent d'autres, écrites sous la plume de l’ami Bernard Cnocquart. Un poème de saison, que nous partageons avec plaisir.

     

    Depuis ma tendre enfance, c’est toujours un réel plaisir,

    dès que l’aube apparaît de parcourir bois et forêts,

    à la recherche de ces trésors, objets de bien de désirs,

    que sont ces champignons si appréciés cèpes et bolets.

     

    Pas plus haut que trois pommes, j’accompagnais Tonton,

    dans les bois d’alentour susceptibles d’une bonne cueillette,

    du côté du Bousquet ou la Mandrière, mais pour les mousserons,

    c’est vers Constantine que nous les trouvions, ah, ces omelettes.

     

    Déjà dans les années soixante, mon panier sous le bras,

    je partais à pied depuis la maison, par Mireval et Villaret,

    pour retrouver le bois de Léran avec ses grands « fajas »,

    mais il n’y avait pas encore ce lac qui a tout dénaturé.

     

    La forêt était alors immense, et les chercheurs nombreux,

    rien n’était encore interdit, pas de garde assermenté,

    alors dans les fougères, j’ouvrais bien mes yeux,

    pour découvrir ces cèpes de Bordeaux dans toute leur beauté.

     

    Selon les années, tributaire de la météo, du soleil et de la lune,

    je trouvais alors dans des coins bien propices,

    des jolies têtes de nègre, pour moi enfant, véritable fortune,

    que je cachais dans mon panier sous des feuillages complices.

     

    Je redescendais alors au village, fier de mes trouvailles,

    jamais avec de grosses quantités, en restant raisonnable,

    pour que Maman nous régale de poêlées persillées, subtil mariage,

    et faire quelques conserves pour agrémenter plus tard la table.

     

    Les années ont passé dans l’attente des journées automnales,

    quand après un bel orage et bénéficiant des rayons du soleil,

    je profitais alors des week-ends de repos pour partir en cavale,

    dans les bois et forêts, heureux, tous les sens en éveil.

     

    J’avais alors élargi mon territoire de recherches,

    je découvrais Pépoulan, ses châtaigniers avec ces cèpes blonds,

    Aiguillane où il fallait ruser face aux propriétaires revêches,

    pour ramasser avant eux ces champignons en haut du mamelon.

     

    Avec mes parents, j’ai découvert la forêt de Bélesta,

    le petit bois joli et dans la mousse de magnifiques bouchons,

    mais la forêt d’aujourd’hui est dans un drôle d’état,

    les majestueux sapins sont souvent moribonds.

     

    Avec Pierre, je l’ai accompagné dans les bois de Vilhac,

    coin réputé pour ses trésors gastronomiques si convoités,

    mais heureusement que ce pro a souvent garni mon sac,

    car le chercheur amateur était bien vite désorienté.

     

    Depuis quelques années retraité, j’ai alors tout mon temps,

    de chercher dans ce bois de Bentaillole à la Tuilerie,

    la pousse de la nuit, rêvant souvent de cet instant,

    de découvrir ce fameux « rédol » tant espéré, quelque peu ébahi.

     

    Mais combien de sorties où je rentre bredouille,

    les cèpes ne sont pas au rendez vous, mais c’est si beau,

    le vent chantant dans les arbres de couleur rouille,

    et les feuilles qui voltigent formant comme un rideau.

     

    Mais ce matin là, ma persévérance est alors récompensée,

    près de l’arbre blanc, ils sont bien là, sous les feuilles,

    laissant dépasser qu’un peu de leur chapeau, bien cachés,

    alors délicatement, avec mon couteau l’Ariégeois, je les cueille.

     

    Un peu plus loin sous les grandes « fajanes », ils sont à découvert,

    ils semblent pavoiser au milieu des trompettes,

    car ces cèpes ont de l’allure, rien à voir avec les lactaires,

    avec ces grosses queues bien plus grosses que leurs têtes.

     

    Dans quelques jours, les rouges vont apparaître,

    ceux de couleur grenat brillant, ils sont magnifiques,

    et peut être qu’au milieu des broussailles, sous les hêtres,

    je découvrirai les noirs, couleur d’ébène, les mythiques.

     

    Mais dans ce bois de Léran, il y a bien moins de chercheurs,

    on n’entend plus les chansons de Madame et Monsieur Aribaud,

    les anciens ne sont plus de ce monde et puis il y a la peur,

    la peur du garde qui dresse des procès-verbaux.

     

    Alors pour quelques dizaines d’euros, je prends donc une carte,

    me permettant encore d’assouvir ma passion,

    tant que dans mes rêves, du bout de mon bâton j’écarte

    quantité de fougères découvrant des cèpes à profusion.

            Bernard Cnocquart (Mars 2013)