C’était il y a exactement 45 ans, Chalabre l’industrielle s’apprêtait à perdre l’un de ses derniers atouts, prélude à un inexorable déclin. Au milieu du siècle dernier pourtant, « le rayonnement des chaussures Canat s'étendait sur tout le territoire de l'Union française et des pays voisins » (Marie-Louise Saddier, Tome VI « Il était une fois Chalabre »). Avec un potentiel industriel de pointe, une production et un savoir-faire d'un haut niveau de qualité, les Ets Antoine Canat avaient incontestablement favorisé l'essor industriel du pays chalabrais (voir l'historique détaillé de la société dans ce même Tome VI, rédigé sous la plume de Robert Roncalli).
Mais le 19 décembre 1974, MM. René Boyer maire de Chalabre et Jean Tisseyre conseiller général du canton, se trouvent à Paris pour y rencontrer M. Varocco, chef de mission auprès du ministre de l'industrie (Michel d’Ornano), accompagnés du député de l’Aude Robert Capdeville et du préfet de l’Aude Charles Gosselin. La délégation doit alerter les pouvoirs publics sur la situation des ouvriers de la chaussure à Chalabre. La suite hélas, n’aura échappée à aucun des Chalabroises et des Chalabrois. Le texte qui suit retrace très brièvement les événements qui ont précédé la fin de la longue et florissante histoire entre les Chalabrois et la Famille Canat.
Après un premier dégraissage des effectifs en 1972, un pallier sera franchi avec l'arrivée d'un nouveau paramètre, le personnel est invité à appréhender la notion de rendement. En 1973, le groupe Mapa-Hutchinson devenu propriétaire de l'usine Canat après avoir fusionné avec la CFP (Compagnie Française des Pétroles, future société Total), informe le comité d'entreprise qu'il envisage de liquider l'usine de Chalabre. Les raisons motivant cette décision restent floues, mais l’élément de langage « délocalisation » semble déjà promis à un bel avenir. 335 emplois sont en jeu à Chalabre, mais le monde est vaste et la CFP prospecte depuis 1967 en Asie du sud-est.
Au cours de l'année 1974, l'ombre du couperet va obscurcir le ciel chalabrois et le sursis accordé au site audois vit ses derniers mois. Le 12 décembre, une première manifestation pour l'emploi est organisée à Limoux. Le 16 décembre, René Boyer maire et Jean Tisseyre conseiller général, demandent audience à M. le sous-préfet de Limoux pour lui faire part des inquiétudes au sujet des licenciements à l'usine Canat-Hutchinson. Le 19 décembre ils sont à Paris, mais le 7 janvier 1975, les premières décisions de licenciement sont annoncées. Le 9 janvier l'usine est occupée, le 11 un comité de défense est créé, tout cela sera vain.
Le 1er juillet 1975, la page Hutchinson est tournée, une nouvelle raison sociale naît au pied du Calvaire et le pays chalabrais va se familiariser avec l'entité Canat S.A. En 1979 cette dernière devient la meilleure exportatrice du Languedoc-Roussillon. En juillet 1983, la Sté Canat S.A passe en SCP (société civile professionnelle) et le 2 janvier 1985, Christian Canat cède les rênes à son fils Jean-Pierre. En mars 1986, l'industriel Bernard Durand, fils d'Albert, le marchand de cycles de la Rue Terre-Blanche, chef d'entreprise à Saint-Palais (64), prend le relais en conservant quarante employés. Le 21 janvier 1988, un incendie nocturne d'origine indéterminée signe l'arrêt définitif de la production de chaussures à Chalabre.
Commentaires
L’Incendie est-il le seul coupable de la fermeture de l’usine dirigé par Monsieur Durand ?
Je pressens que cette question n'est pas du genre à rester sans réponse.