Les bancs de l'avenue Auguste-Cathala regretteraient-ils le passé ? (photo 3 avril 2020)
« Recouvertes de noir, qui tombe sur leurs os,
Les vieilles sur les bancs, tricotent des propos.
Adieu les temps des guerres, fini le temps d’aimer,
Les vieilles sur les bancs, n’ont plus rien à pleurer.
Et les tricots s’allongent, les propos s’alourdissent
Et le soleil trop fort, noie leurs yeux de malice ».
Ces premières lignes d’un poème écrit en 1988 à Los Angeles par Didier Pont, enfant de Chalabre disparu en 1991, évoquent un temps lointain, et riche de vestiges discrètement présents. A l’image des bancs de pierre alignés dans le prolongement du Pont-Neuf, chargés de procurer un peu de repos au chaland, depuis près de 240 ans. Un bel âge pour ces créations taillées dans la pierre, si l’on en croit les archives municipales qui précisent comment les administrateurs de la Terre Privilégiée avaient fait entreprendre en 1770, « La construction de nouvelles routes et des ponts nécessaires. A Chalabre doivent se réunir les fragments de route conduisant vers Limoux, Mirepoix, Rivel et Sainte-Colombe ». C’est ainsi que la première culée « du grand pont de pierre sur le Chalabreille, le plus considérable qu’il y ait sur cette rivière », sera construite en 1779.
C’est le Pont-Neuf qui prend forme, et il est permis d’imaginer que nos bancs de pierre ne tarderaient pas à venir agrémenter la nouvelle entrée vers le cœur de la bastide. Deux rangées d'acacias à présent disparues ne seront plantées que bien plus tard, tandis que les calèches enjamberont le Chalabreil, pour aller chercher les voyageurs entrés en gare de Chalabre, munis d'une réservation à l'Hôtel de France.
Après avoir vécu l’arrivée des services postaux, téléphoniques et télégraphiques, vu hacher leurs amis végétaux, nos témoins faits de pierre gardent aussi en mémoire le bruit de « carretons » de foin en transit. Non loin de ce qui allait devenir un rond-point accélérateur de véhicules. Aujourd’hui bien mal en point, ces bancs déserts qui semblent regretter le passé, bénéficieront-ils peut-être un jour, des soins que l’on ménage aux doyens.
Commentaires
Je me souviens dans les années 60 ces acacias un peu biscornus se faisaient heurter par les caravanes quand 2 véhicules un peu encombrants se croisaient ..... le soir venu on se mettait dans l'ombre qu ils nous procuraient vis à vis de la lumière des réverbères pour conter fleurette ..
Un article "Moralesque" sur les bancs, avec une préface douloureuse certes, mais quel enchantement que ces lignes.
Merci Momo.
Si j'avais été membre du conseil municipal ayant décidé la construction de la poste sur cette magnifique allée, le Maire aurait eu fort à faire!
entièrement d accord avec toi
Ils ont tant de choses à raconter ces bancs
Malhereusement ils se cassent tous ou ils s'effritent et une petite rénovation ne leur ferait pas de mal ,
il faudrait juste mettre un élément pour les soutenir en leur milieu
Peut être un jour auront ils une rénovation et ainsi raconteront ils encore pour les générations futures.