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Poésie - Page 29

  • Devenir vieux

    jean paul dréauDans son manuel de savoir vivre à l'usage des rustres et des malpolis, Pierre Desproges déclarait : « Certes, il est pénible de vieillir, mais il est important de vieillir bien, c’est-à-dire sans déranger les jeunes ». A l’heure où la parole confinée derrière un masque est parfois remplacée par des regards obliques, ces quelques lignes écrites en 1988 par Jean-Paul Dréau. Paroles interprétées par Denise Grey,… depuis la cuisine.

    On s'accroche au passé
    Comme un lierre à un mur
    Et les miroirs gelés
    Nous renvoient des blessures

    Du temps passé trop vite
    Qui rit de notre peau
    On a le cœur qui s'effrite
    Comme les pierres d'un château

    On se tait de nos maux
    Pour ne pas se souvenir
    On pense à ce bateau
    Qui nous fera partir

    On oublie nos histoires
    Pour ne pas en parler
    Ca ennuie les enfants
    Et ça nous fait pleurer

    C'est comme une bougie
    Qu'on oublierait d'éteindre
    Qui brûlerait toute une vie
    Pour que l'on puisse peindre

    Sur les murs de nos yeux
    Tout ce qu'on a appris
    Le chagrin, la tendresse,
    Les jours bleus, les jours gris,
    C'est ça, devenir vieux aussi

    On fume les heures qui restent
    Dans un même fauteuil
    Posé près d'une fenêtre
    Ou dessous un tilleul

    Et les heures goutte à goutte
    Nous oublient peu à peu
    Le nez dans notre soupe
    Et les mots dans nos yeux

    On est comme un vieux meuble
    Qu'on cire de temps en temps
    Une table ou un lit
    Qu'on n'aime plus vraiment

    Alors on s'habitue
    A vivre doucement
    A ne pas faire de bruit
    A respirer seulement

    Et quand comme un oiseau
    On sent l'heure du départ
    Les ailes au ras du dos
    On éteint son histoire

    C'est pas que ça fait souffrir
    Ca fait même pas pleurer
    C'est pas dur de partir
    Quand on ne veut plus rester

    C'est ça, devenir vieux aussi

    Jean Paul Dréau 1988

  • Paisible Chalabre

    « Meurtres à Chalabre », paru en octobre dernier, est un roman policier écrit par Gilles Billaut et Hervé Cuinet, roman d’énigmes dont l’intrigue se situe dans un cadre exclusivement chalabrois. Comme dans tout bon polar, l’enquête criminelle ne manque pas de coups de théâtre, de taille à tenir le lecteur en haleine. L’ami Bernard est de ceux-là.

    bernard cnocquart

    Chalabre, après la tourmente… le calme

    c’est terminé, le calme est revenu sur Chalabre,                                              

    fins limiers et gendarmes ont enfin réussi leur capture,                                        

    le Chalabreil n’est qu’un filet d’eau en ce mois de décembre

    troublé seulement par les canards recherchant leur pâture.

     

    Entre une chope de bière et une assiette de haricots                      

    me voici tout de suite captivé par une enquête hors normes

    menée de main de maître par une équipe de cocos                              

    désirant trouver au plus vite ces meurtriers fantômes.

     

    Soudés comme les rugbymans autour du capitaine, le maire,

    le gendarme retraité, volailler à ses heures a repris du service,

    et même Monsieur le curé bien loin de sa chaire                  

    suivent les conseils du correspondant local, lui aussi complice.

     

    Quel plaisir de découvrir tous ces villageois                                

    avec des noms bizarres mais reconnaissables à souhait,                    

    ces rues, ces places et commerces du pays chalabrois                          

    témoins le temps d’un roman de crimes insensés.

     

    Même si ces autochtones ont fait appel à des étrangers,                  

    un franc-comtois rusé et un marseillais intrépide                        

    qui depuis bien longtemps font partie du paysage cazalais,

    c’était bien nécessaire pour résoudre ces crimes morbides.

     

    Mais quelle agitation autour de cette pauvre gendarmette

    cherchant la vérité et qui a connu tant de surprises,                                      

    c’est plus calme aujourd’hui, pas d ‘article sur la gazette,                  

    plus de fête, de musique, de sorties, drôle de crise.

     

    Et si les mutilations atroces sur les corps de Paul et d’Anne

    ont quelque peu refroidi l’enthousiasme du lecteur,                        

    j’ai suivi par curiosité jusqu’au bout ce fil d’Ariane                                        

    en me mêlant parfois à tous ces enquêteurs.

     

    Merci à Gilles et Hervé pour cette belle fiction,                            

    pour cet hommage appuyé à ces gens de Chalabre,                        

    et quel beau cadeau en cette année privée de réveillon                            

    à déposer sous le sapin sans faire de palabre.

     

    Juillet 2021, le corona virus est vaincu, le Cazal est en fête,    

    un fumet bien connu se répand sur la place. Tout est prêt.

    Sainte Madeleine veille sur le hameau, on remplit la buvette.

    Drapé dans son écharpe tricolore, Touste le maire est stressé,

     

    Richard a remis sa tenue sans képi mais avec casquette,

    même le juge Bronbilla a quitté le pays carcassonnais,          

    sûr qu’avec tout ce monde, au son du tambour et trompette

    les haricots auront un meilleur goût que les années passées.

    Bernard, le 11 décembre 2020

  • Le désordre des Fables

    jielL’élève JIEL, un brin mélancolique, ou peut-être seulement appliqué, invite à réviser quelques fables qui ont accompagné sa jeunesse, et la nôtre. Il sera permis de se demander quelle mouche a bien pu le piquer.

    Les Fables : Le coche et la mouche, La laitière et le pot au lait, Le corbeau et le renard, Le rat de ville et le rat des champs.

    « Pardon Maître pour la suite !... »

     

     

    Le désordre des Fables

    Dans ce chemin pentu et malaisé écrasé de soleil

    Six robustes chevaux s’emploient en guise d’attelage

    Leurs efforts sur ce coche branlant font merveille

    Une mouche survient et s’affaire autour de l’équipage

    Que peut attirer de la sorte un insecte dans ce paysage

    Non pas tant un labeur inutile de la part d’un importun

    Mais plus sûrement de la panière de Perrette odeur de laitage

    Qui prudente dans la diligence prit place avec quelques-uns

    Quand sur ce carrosse chancelant mal ficelé à l’arrière

    Son bagage finit sur le sentier herbeux à grand fracas

    Le pot au lait résiste préservant les projets de la laitière

    Tandis qu’un beau fromage roule dans la pente tout en bas

    Un corbeau dans les airs a observé avec curiosité la scène

    Il voit ce butin étrange et prestement le saisit dans son bec

    Fier de cette prise inattendue il se pose sur un grand chêne

    Espérant bien recevoir les éloges du renardeau ce blanc-bec

    Le renard passe mais vers cette proie ne daigne lever la tête

    Inutile de flatter ce rustre qui ne croasse plus avec son fromage

    L’oiseau en prend ombrage et pour laver son honneur de bête

    Ecarte ses mâchoires injuriant le malotru sans ambages

    La vieille croûte ramollie ainsi perdue au pied de l’arbre tombe

    Sur le trajet de deux rats apeurés venant de la ville voisine

    Les rongeurs après les déboires d’un souper quitté en trombe

    Enfin tranquilles se goinfrent sensibles au fumet de la cuisine

    La morale de cette histoire n’est point celle que l’on croit

    Une mouche aussi pénible fut elle n’a rien à faire d’un coche

    Et préfère à n’en pas douter l’odeur savoureuse du lait

    Quant à Perrette elle aura bientôt pièces sonnantes en poche

    Car la diligence de la ville est sûre chacun le sait

    De son côté le corbeau n’a guère de doute sur son ramage

    Mais ne résiste pas au plaisir de pester sur le renard

    Enfin quoi de plus normal que des ratons profitent d’un fromage

    Qui dans le calme retrouvé est tombé du ciel par hasard

    Cette histoire singulière n’est point celle que le Maître souhaitait

    Mais quel aurait été l’avis de tous ces acteurs invités malgré eux

    Peut être tout simplement que dans leur monde on les laissa en paix

    C’est tout du moins ce que pense le modeste élève par trop envieux

    JIEL

  • Bobine de ma vie

    Avec l'arrivée du mois de décembre, déjà, JIEL est de retour et propose une évocation du temps qui passe. Laquelle ne devrait pas laisser insensibles les soixantenaires de l’année 2020, que l'état-civil indique nombreux en Chalabrais. Ils se reconnaîtront certainement, même un peu.

    jiel,bobine de ma vie

    Bobine de ma vie

    Dans une rue étroite et pleine de vie

    Je découvre le monde et son lot de folies

    Entre soeurs aimantes et parents ravis

    Tout est si simple dans mes rêves jolis

     

    Et l’eau coule sous le pont vieillissant

    Je regarde tourner le monde impuissant

    Que les vieux sont jeunes quand on a dix ans

     

    L’amour s’empare de mon être fragile

    Insouciance coupable d’avenir prometteur

    Nul ne peut m’écarter d’une si jolie fille

    Dans tes yeux enjôleurs je dépose mon coeur

     

    Et l’eau coule sous le pont vieillissant

    Je regarde tourner le monde impuissant

    Que les vieux sont cons quand on a vingt ans

     

    Nous avons su construire le plus bel écrin

    Pour y déposer nos bijoux de bonheur

    Cet amour sans limite qui jamais ne prend fin

    Notre vraie richesse nos uniques valeurs

     

    Et l’eau coule sous le pont vieillissant

    Je regarde tourner le monde impuissant

    Que les vieux sont sages quand on a trente ans

     

    Confort d’existence et métier inquiétant

    Mes limites physiques déjà atteintes

    Un jour tout se transforme devient différent

    Je navigue serein entouré et sans crainte

     

    Et l’eau coule sous le pont vieillissant

    Je regarde tourner le monde impuissant

    Que les vieux sont curieux quand on a quarante ans

     

    L’expérience s’affirme et s’invite sous mon toit

    L’entourage ne voit plus qu’elle à travers moi

    Suis-je vraiment le même ou un être sans foi

    Je m’efforce de paraître pour cacher mon émoi

     

    Et l’eau coule sous le pont vieillissant

    Je regarde tourner le monde impuissant

    Que les vieux sont heureux quand on a cinquante ans

     

    Les rides se creusent mes paupières s’affaissent

    Seuls les regards d’amour embellissent les ombres

    Je ne crois plus en moi qu’à travers la jeunesse

    Je vous ai tant aimé dans ma vie sans encombre

     

    Et je me penche sur le pont vieillissant

    Je regarde sombrer le monde impuissant

    Que les vieux sont vieux quand on a soixante ans

    JIEL