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Poésie - Page 31

  • Quatorze

    En cette journée du souvenir, qui ne permettra pas aux Chalabroises et aux Chalabrois de se joindre à l'hommage officiel rendu aux Poilus, JIEL propose un poème pour ne pas oublier.

    jiel

    Une croix et un poppy déposés au monument aux Morts par la communauté anglophone

    Dimanche 8 novembre 2020

    Quatorze

    Dans cette nuit d’été au ciel de lumière

    Le vacarme des canons a brisé leurs tympans

    Les hurlements bestiaux venus des ténèbres

    Ont changé ces hommes en fantômes rampants

     

    Les rats effrayés ont regagné leur tanière

    Les poilus sont comme eux gris et puants

    Recouverts de poudre de sang de poussière

    A peine savent-ils encore qu’ils sont vivants

     

    Dans ces dernières minutes avant le chaos

    Ils serrent sur leur coeur une photo froissée

    Ou le papier usé de mots d’amour si beaux

    D’une mère adorée ou d’une bien-aimée

     

    A la première lueur de ce jour dérisoire

    Ils bondiront hors de leur refuge misérable

    Pour aller chercher les larmes de gloire

    D’une course éperdue d’un destin pitoyable

     

    Le silence est revenu l’obscurité s’éteint

    Les yeux de mes camarades d’infortune

    Racontent leur vie prédisent leur fin

    Les regards d’effroi leur dernière torture

     

    Ils oublient désormais la misère des jours

    Les blessures du corps les fêlures de l’âme

    La peur de la mort dans les tripes toujours

    Demain pour certains pour les autres le drame

     

    Le soleil va bientôt pointer sur la nature absente

    Serrés comme un seul dans des odeurs confuses

    De merde et de vinasse dans une agitation lente

    La baïonnette au canon quand déjà les balles fusent

     

    Le sifflet retentit les hommes devenus fauves

    Au prix de mille efforts se lancent dans la terreur

    Et courent sans penser et tombent sans cause

    Dans une folie collective de mort et d’horreur

    JIEL

  • Deux fleurs

    Quand les feuilles tombent et tourbillonnent, JIEL s'amuse à suspendre l'automne, avec une rencontre fleurie (Photos Aurélien Moralès). 

    jielDeux fleurs

    Deux fleurs se caressaient sur le bord d’un chemin

    Depuis des jours elles s’aimaient et parlaient de lendemain

    Reconnaissantes à dieu de les avoir réunies

    Elles remerciaient les cieux le jour comme la nuit

     

    Le monde tout autour admirait leur beauté

    Abeilles et colibris s’arrêtaient les saluer

    L’escargot ce pataud si glouton passait discret

    L’amour le bonheur la vie pour seul secret

     

    La nature en elles retrouvait ses vertus

    Dans l’immensité de son royaume perdues

    Deux petites fleurs se dorlotaient sans façon

    Ignorantes du monde et frêles comme papillons

     

    jielLe soleil les cajolait à longueur de journée

    La lune attentionnée gardait douces leurs soirées

    Nul n’aurait osé contrarier leur idylle

    Tant elles étaient belles et pourtant si fragiles

     

    La vie même sublime n’est pourtant qu’éphémère

    Par un frais matin dans la rosée amère

    Ce couple magnifique si discret exemplaire

    Avait cessé de vivre avait cessé de plaire

                JIEL

  • « L'automne d’ici-bas », un poème de JIEL

    Une nouvelle saison vient de s'installer, inspiratrice d'un poème écrit sous la plume de JIEL, proposé aux lecteurs.

    L’automne d’ici-bas

    Les bois se préparent à affronter l’hiver

    L’été s’éloigne et perd de sa splendeur

    Les arbres éparpillent leur bel habit vert

    Les ruisseaux retrouvent leur vigueur

     

    Une lasse clarté s’écoule sur les collines

    Caressant avec tendresse la nature assoiffée

    Dans les sous-bois colorés sans retenue aucune

    La lumière s’exhibe comme mue par des fées

     

    Le cycle immuable de la vie suit son cours

    Tourne la page et ouvre le même chapitre

    Celui de la saison nouvelle d’un autre parcours

    Du peintre au chevalet et du poète au pupitre

     

    La frénésie retrouvée des chercheurs d’or

    S’active dans les hêtraies et les taillis épais

    Pourchassant l’enchanteur jeteur de sort

    Qui répand selon ces caprices le noble bolet

     

    Un vent froid venu du nord laisse croire

    Que la forêt s’agite à perdre haleine

    Blotti au coeur de la montagne noire

    Le village a revêtu son écharpe de laine

     

    Les habitants partout sont à l’oeuvre

    D’aucuns fuient vers des contrées clémentes

    Fiers de la fidélité dont ils font preuve

    D’autres sont heureux et ne se lamentent

     

    Dans le foisonnement de potagers magiques

    La terre généreuse confie au jardinier ses secrets

    Aux tréfonds des bois des hêtres magnifiques

    Trop vieux dans la tempête se couchent discrets

     

    Les meutes de chiens sont retournées au labeur

    Tant de folles courses et d’odeurs retrouvées

    Dans cette quête ancestrale passion du chasseur

    La récompense ultime de la bête débusquée

     

    J’irai encore sur les chemins herbeux

    Ma fidèle chienne toujours dans mes pas

    Nourrir l’inspiration qui me rend heureux

    Dans ce nouvel automne d’ici-bas

    JIEL

  • Une passion, les champignons

    bernard cnocquart« Dans les bois mouillés les petits champignons, au chapeau si mignon, un matin d’automne se sont réveillés, et ingénument ils ont bâillé ». Ces premières paroles d'une chanson, anonyme, en révèlent d'autres, écrites sous la plume de l’ami Bernard Cnocquart. Un poème de saison, que nous partageons avec plaisir.

     

    Depuis ma tendre enfance, c’est toujours un réel plaisir,

    dès que l’aube apparaît de parcourir bois et forêts,

    à la recherche de ces trésors, objets de bien de désirs,

    que sont ces champignons si appréciés cèpes et bolets.

     

    Pas plus haut que trois pommes, j’accompagnais Tonton,

    dans les bois d’alentour susceptibles d’une bonne cueillette,

    du côté du Bousquet ou la Mandrière, mais pour les mousserons,

    c’est vers Constantine que nous les trouvions, ah, ces omelettes.

     

    Déjà dans les années soixante, mon panier sous le bras,

    je partais à pied depuis la maison, par Mireval et Villaret,

    pour retrouver le bois de Léran avec ses grands « fajas »,

    mais il n’y avait pas encore ce lac qui a tout dénaturé.

     

    La forêt était alors immense, et les chercheurs nombreux,

    rien n’était encore interdit, pas de garde assermenté,

    alors dans les fougères, j’ouvrais bien mes yeux,

    pour découvrir ces cèpes de Bordeaux dans toute leur beauté.

     

    Selon les années, tributaire de la météo, du soleil et de la lune,

    je trouvais alors dans des coins bien propices,

    des jolies têtes de nègre, pour moi enfant, véritable fortune,

    que je cachais dans mon panier sous des feuillages complices.

     

    Je redescendais alors au village, fier de mes trouvailles,

    jamais avec de grosses quantités, en restant raisonnable,

    pour que Maman nous régale de poêlées persillées, subtil mariage,

    et faire quelques conserves pour agrémenter plus tard la table.

     

    Les années ont passé dans l’attente des journées automnales,

    quand après un bel orage et bénéficiant des rayons du soleil,

    je profitais alors des week-ends de repos pour partir en cavale,

    dans les bois et forêts, heureux, tous les sens en éveil.

     

    J’avais alors élargi mon territoire de recherches,

    je découvrais Pépoulan, ses châtaigniers avec ces cèpes blonds,

    Aiguillane où il fallait ruser face aux propriétaires revêches,

    pour ramasser avant eux ces champignons en haut du mamelon.

     

    Avec mes parents, j’ai découvert la forêt de Bélesta,

    le petit bois joli et dans la mousse de magnifiques bouchons,

    mais la forêt d’aujourd’hui est dans un drôle d’état,

    les majestueux sapins sont souvent moribonds.

     

    Avec Pierre, je l’ai accompagné dans les bois de Vilhac,

    coin réputé pour ses trésors gastronomiques si convoités,

    mais heureusement que ce pro a souvent garni mon sac,

    car le chercheur amateur était bien vite désorienté.

     

    Depuis quelques années retraité, j’ai alors tout mon temps,

    de chercher dans ce bois de Bentaillole à la Tuilerie,

    la pousse de la nuit, rêvant souvent de cet instant,

    de découvrir ce fameux « rédol » tant espéré, quelque peu ébahi.

     

    Mais combien de sorties où je rentre bredouille,

    les cèpes ne sont pas au rendez vous, mais c’est si beau,

    le vent chantant dans les arbres de couleur rouille,

    et les feuilles qui voltigent formant comme un rideau.

     

    Mais ce matin là, ma persévérance est alors récompensée,

    près de l’arbre blanc, ils sont bien là, sous les feuilles,

    laissant dépasser qu’un peu de leur chapeau, bien cachés,

    alors délicatement, avec mon couteau l’Ariégeois, je les cueille.

     

    Un peu plus loin sous les grandes « fajanes », ils sont à découvert,

    ils semblent pavoiser au milieu des trompettes,

    car ces cèpes ont de l’allure, rien à voir avec les lactaires,

    avec ces grosses queues bien plus grosses que leurs têtes.

     

    Dans quelques jours, les rouges vont apparaître,

    ceux de couleur grenat brillant, ils sont magnifiques,

    et peut être qu’au milieu des broussailles, sous les hêtres,

    je découvrirai les noirs, couleur d’ébène, les mythiques.

     

    Mais dans ce bois de Léran, il y a bien moins de chercheurs,

    on n’entend plus les chansons de Madame et Monsieur Aribaud,

    les anciens ne sont plus de ce monde et puis il y a la peur,

    la peur du garde qui dresse des procès-verbaux.

     

    Alors pour quelques dizaines d’euros, je prends donc une carte,

    me permettant encore d’assouvir ma passion,

    tant que dans mes rêves, du bout de mon bâton j’écarte

    quantité de fougères découvrant des cèpes à profusion.

            Bernard Cnocquart (Mars 2013)